Sijilmâsa

Coordonnées géographiques : 31°17’06’’ N ; 4°16’34’’ W

Les recherches les plus récentes ou en cours à Sijilmâsa

Situation topographique du site de Sijilmâsa : (a) l’oued Ziz ; (b) emprise de la zone archéologique de Sijilmâsa ; (c) séguia Chorfa. Situation topographique du site de Sijilmâsa : (a) l’oued Ziz ; (b) emprise de la zone archéologique de Sijilmâsa ; (c) séguia Chorfa. Crédits : Mission archéologique maroco-française, 2016.

En dépit des travaux archéologiques conduits dans la seconde moitié du XXe siècle, le site archéologique de Sijilmâsa n’a pas encore livré tous les vestiges de son passé glorieux. C’est ainsi que le programme pluridisciplinaire maroco-français « Sijilmâsa : ville, oasis, carrefour » a été initié en 2011, sous la direction de Elarbi Erbati (INSAP) et François-Xavier Fauvelle (Collège de France), et s’est déployé autour de la fouille urbaine du site et de son environnement immédiat, ainsi que d’une reconnaissance de son arrière-pays minier.
Les principaux résultats archéologiques de la mission maroco-française ont tout d’abord contribué à redéfinir le modèle urbain de la Sijilmâsa médiévale. En effet, l’étude typologique et technologique des élévations en pisé disséminées sur l’ensemble de la zone archéologique a permis d’individualiser plusieurs segments de murailles appartenant à des îlots urbains spatialement distincts, datés respectivement des Xe, XIIe-XIIIe et XIVe siècles, qui ont pu ou non coexister. S’ajoute à cela une étude typologique affinée du vaste complexe de murs en élévation, considérés aussi bien par les habitants de la région que par la littérature scientifique antérieure comme les vestiges de la mosquée et de la madrasa de Sijilmâsa. Or, deux états distincts de ces bâtiments ont pu être observés et datés de la fin du XVIe au XIXe siècle ; l’un ayant pu être légitimement identifié, grâce aux sources écrites, comme un ksar royal alaouite du XVIIIe siècle (Erbati et al. 2016). Un premier plan phasé de répartition des vestiges de Sijilmâsa a également été dégagé, plaidant en faveur d’un modèle urbain à la fois polycentrique et se développant par essaimage dans le paysage au gré des phases d’abandon et de reconstruction de la ville. Ce modèle apparait donc en désaccord avec les résultats présentés dans les publications issues des opérations archéologiques antérieures, lesquelles avancent l’idée d’une très vaste cité, enceinte à l’intérieur de murailles, qui se serait développée par aggradation in situ au sein d’un périmètre de plusieurs kilomètres de côté (Lightfoot et Miller 1996 ; Messier et Miller 2015). Une célèbre « porte » figurant dans de nombreuses expositions et décrite dans ce modèle comme l’une des portes d’accès à la Sijilmâsa médiévale (« Bab Fas »), a fait l’objet d’une étude approfondie. Il s’avère que cette porte peut être replacée, avec plusieurs autres vestiges environnants, dans une séquence architecturale remontant à plusieurs siècles, et surtout qu’elle appartient selon toute probabilité au ksar voisin d’al-Mansuriya, et non à Sijilmâsa (Darles et al. 2016).
Au cœur des secteurs fouillés depuis 2012, trois observations générales ont pu être faites. La première est que les vestiges des bâtiments médiévaux, en particulier les sols, sont très mal conservés, parfois seulement à l’état de lambeaux de quelques décimètres carrés sur une aire de fouille de plusieurs dizaines de mètres carrés. La deuxième constitue peut-être un facteur explicatif de la première : la fouille a permis d’observer de très nombreuses fosses, qui ont systématiquement été enregistrées à la fouille comme unités distinctes. Leur ouverture n’a pas toujours pu être reconnue par les archéologues mais il est clair qu’elles transgressent les niveaux archéologiques sous-jacents. Elles peuvent avoir eu diverses fonctions (fondations de piliers, zones de rejet) mais la plupart d’entre elles contiennent des passes plus ou moins épaisses de sable éolien qui témoignent de leur maintien à ciel ouvert postérieurement à leur creusement. Cela plaide en faveur d’une ou plusieurs phases de pillage du site qui expliquent en partie la mauvaise conservation des vestiges et la quasi-absence de mobilier en place. Enfin, troisième observation : tous les murs individualisés à la fouille, quelle que soit l’époque à laquelle ils appartiennent, sont des arases d’élévations en terre faisant appel au pisé et à l’adobe. Certains de ces murs reposent sur des assises d’un ou deux lits de blocs de schiste. Cela détone notamment avec le soin apporté à la réalisation des sols et de structures à vocation hydraulique, très bien conservés du fait d’un fort investissement technique marqué par l’emploi de la chaux, parfois sous forme de béton (Soubira et al. 2015 ; Soubira 2018,2020).
Au terme des plus récentes fouilles maroco-françaises (2016), l’équipe a proposé une séquence d’occupation des secteurs fouillés allant du VIIIe/IXe siècle aux XVIe-XVIIIe siècles, alternant des phases d’occupation (VIIIe-Xe s., XIIIe s., XVIe-XIXe s.) et d’abandon (XIe-XIIe s., XIVe-XVIe s.), identifiées grâce à l’analyse technologique et à la datation de plusieurs sols bien individualisés et corrélés avec des unités stratigraphiques. Une monographie reprenant l’ensemble des résultats archéologiques est sous presse dans la collection « Villes et sites archéologiques du Maroc » de l’INSAP.
Les fouilles maroco-françaises se poursuivent (2020-2024) sous la direction d’Elarbi Erbati et Thomas Soubira. S’inscrivant dans la continuité des travaux opérés au cours des dernières années, elles ont notamment pour objectifs : de finaliser l’étude du mobilier céramique provenant des zones fouillées depuis 2013 et dont la séquence chronostratigraphique est maintenant bien connue ; de confirmer ou infirmer le modèle d’une ville polynucléaire en délocalisant la fouille vers des secteurs encore inexplorés ; de replacer Sijilmâsa dans son contexte régional en abordant divers sites périphériques, par le biais de prospections et de sondages archéologiques.
Thomas Soubira, janvier 2020

« Sigilmassa : The City of Gold »
# Mémoire de la recherche

« Sigilmassa : The City of Gold »

Film « Sigilmassa : The City of Gold » (1971) réalisé par Boris de Rachewiltz sous le patronage de l’UNESCO.
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Photogrammétrie
# Mémoire de la recherche

Photogrammétrie

Mausolée Al-Aqwas, photogrammétrie réalisée par la mission archéologique Sijilmâsa (INSAP/TRACES)
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